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Justine
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Par Eulaline le 19 Décembre 2014 à 18:49
Cousin,
Il me revient de partager avec toi, désigné héritier, l'avancée du challenge imposé à ma mère et à ton père par nos pairs.
Si je comprends le choix de ma mère de t'adouber, en revanche, le décision de ton père me laisse perplexe.
La mieux disposée à devenir mère et fonder famille est Cécile, cela me semblait évident. Moi, tu sais, à part la musique, la musique et la musique, il n'y a pas grand'chose qui m'intéresse et surtout pas me marier et m'occuper d'une famille... Ton père a voulu, en me choisissant, se venger de sa vie de misère ...? Et faire souffrir autant qu'il a souffert ...? Sache que j'en suis vraiment contrariée, d'autant plus que je le sais, il connaissait mes aspirations!
Cela dit, je vais partir des principes :
1- que tu n'y es pour rien et qu'il n'y a donc, par voie de conséquence, pas de raison que je m'acharne sur toi.
2- : que je n'ai pas le choix et:
2.a - je t'écrirai aussi régulièrement que tu le feras;
2.b - je vais leur faire leur mouflet-là aux Lol et ensuite, qu'on me fiche la paix, hein!
Cela posé, j'accomplis ma tâche 2.a. et te livre l'intimité de ma famille. Ne te sens pas obligé chaque fois que tu m'écris d'entrer dans les détails, cela pourrait devenir vite barbant, ou de me donner ton avis, je n'en tiendrai pas compte.
Père, pour notre malheur, a fini par montrer le bout de son nez, il ne l'avait plus fait depuis que maman avait fêté son anniversaire. Elle n'était pas loin de penser que s'il n'apparaissait plus, c'était tout simplement parce que ainsi âgée, elle ne lui plaisait plus.
Il fut vite prouvé que tel n'était pas le cas.
Mes parents n'ont jamais été un modèle de modération pour ce qui était de se prouver à quel point ils tenaient l'un à l'autre. Et sans doute, nulle autre mort n'aurait pu emporter mère que celle-là: épuisée de trop d'amour. C'est tout elle, ça. Alors que père se remettait de leur nuit d'amour, mère trépassa.
La faucheuse fit son boulot pendant que maman gisait à même le sol et captura l'âme de la fille de la dixième mère, sans une hésitation. Son heure était venue, inutile de tergiverser.
A tout mal un bien: la mort de mère me permit de composer une nouvelle ritournelle dont je ne suis pas peu fière, même si, comme le disait maman, le monde semble encore réticient à mon art. Il faut dire que les gens d'ici, Cousin, manquent atrocement d'ouverture d'esprit et de sensibilité.
" Dans son habit d'obscurité, il l'a emmenée vers la lumière
le pèpère...
trève de blabla, tralala...
Elle est morte, la mama...
La terre ...
n'est plus ton univers
'gaffe aux pirates de l'enfer
petite mère..."
La disparition de maman ramena Zoé à Charles avec toutes les demandes de pardon et d'excuses qu'il fallait pour ferrer mon crétin de frère.
Malgré mes mises en garde et mes conseils avisés, ...
....arriva ce qu'il devait arriver.
" 'e polichinelle est dans le tiroir,
jusqu'à la lie tu vas boire...
'pas le choix...
pauv' bêtaaaah...
T'es vert...
mais t'avais qu'à sortir couvert..."
Et là, la Zoé sortit le grand jeu. Zoé n'était pas Lola, elle ne voulait pas passer sa vie à attendre que le fils Gothic vienne lui rendre ses hommages quelques heures par jour ou par semaine. Elle ne voulait pas non plus être la Sonia, cocufiée et montrée du doigt par tous les braves gens de Willow Creek. Elle s'en voulait de l'aimer tant qu'elle n'avait pu tenir son engagement de se tenir loin de lui.
Evidemment, le Charles tomba dans le panneau.
Et s'en vinrent toutes les déclarations d'amour éternel qui n'engagent que celle qui les reçoit: "Je ne suis pas comme mon père, je n'aime que toi, je n'aimerai toujours que toi. Et si je t'aime c'est aussi parce que tu ne ressembles en rien à ma mère..." et blablabla
........et smack smack smack...
Et pendant que le ventre de la Zoé s'arrondissait et qu'elle se désespérait d'attendre ce fameux mariage...
.....Cécile mit un terme à la surenchère de muscles dont elle avait tant besoin pour se sentir protégée, en rompant avec son dernier monsieur musclor.
Sans doute avait-elle fini par comprendre, comme je ne cessais de lui répéter, que le physique n'était pas tout. Que "gonflette" rime plus souvent avec midinette qu'intellect' et que nous, les femmes Lol, nous n'avons besoin de personne pour nous protéger.
Ou alors David l'avait-il invitée en chimérie: pays de l'amour, de la rêverie, pays où mon frère et Zoé pensaient vivre déjà et n'avais-je rien à voir là-dedans? Peut-être n'était-ce que coïncidence que celui-là ne fut pas bâti comme un mastodonte.
Les voir ensemble, quoi qu'il en soit et même si on raconte que mon cœur n'était que pierre, me rendait heureuse. Ma sœur a tant besoin de quelqu'un qui l'aime et lui, David, semblait remplir ce rôle à merveille.
Ce fut donc dans cette ambiance dégoulinante de beaux sentiments, de rose-bonbon, de poneys qui mangent des arc-en-ciels (je me comprends) que je fêtai mon anniversaire.
Je devins jeune adulte et j'étais aux anges. Plus rien ne pouvait me contrarier.
J'allais enfin pouvoir faire ce dont j'avais envie: vivre de ma musique, composer, jouer... toute la journée si je le souhaitais.
Mon ami de toujours, John, partageait mon bonheur et mon enthousiasme.
J'étais tellement prise par mes projets professionnels que je faillis ne pas remarquer l'énorme bidon qui précédait ma sœur Cécile où qu'elle aille...
Et je faillis également louper la naissance de mon neveu, Arthur.
Toute cette marmaille en devenir me fit revenir sur terre et père et mère y furent pour quelque chose.
Ils me rappelèrent que grâce à ton brave père, mon cher Cousin, je devais moi aussi jouer à la poule pondeuse.
Après avoir fait connaissance avec Arthur, je le trouvai plutôt réussi et plutôt sympathique pour un bébé ...
....Je tentai donc de proposer à Zoé de reprendre leur enfant, qu'ils me le donnent; ils n'auront qu'à en refaire un autre.
Et bien, elle a refusé tout de go, dis donc. Elle aurait pu au moins y réfléchir ou en parler à Charles. Ce n'était pas parce qu'il semblait tout à fait gaga de son fils, mon frère, qu'il l'était vraiment.
Et puis, je les aurais laissés le voir autant qu'ils l'auraient souhaité. Je ne suis pas si cruelle, quand même!
Bref, je pense qu'il va donc falloir que je trouve un autre moyen pour honorer le point 2.b de mon engagement. Je n'ai pas le choix...
Bien à toi et salutations distinguées, mon cher Cousin.
Justine
P.S : Message de ma mère à ton père, je cite : "Même pas vrai que Charles a toujours été mon préféré. Je me devais juste de le protéger plus et mieux que mes autres enfants, lui qui n'avait pas eu la chance de naître fille. Les Lol garçons sont si faibles...je ne veux pas te blesser, mon cher Romuald, mais avoue que c'est vrai..."
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Par Eulaline le 2 Janvier 2015 à 15:26
Mon cousin,
De quelle illusion vous bercez-vous, ton frère et toi, de croire que la seule jeune fille que vous ayez sentimentalement côtoyée puisse être l'élue? D'autant plus que toi, Pierre, et Estéban, ton frère, avez grandi avec Laetitia et Ludivine.
M'enfin, c'est comme si je me mettais à aimer John, mon ami de toujours. John pour moi est un frère sans sexe. Nous avons fait des concours de rots, tous les deux, nous avons défié l'autre à des challenges encore plus stupides. C'est atroce d'imaginer qu'il puisse m'embrasser et me toucher autrement que comme un frère.
J'ai d'ailleurs profité de l'une de ses visites pour le mettre en garde à ce sujet. Jamais, jamais poser ses yeux ou ses mains sur moi d'une autre façon que chaste, très chaste. Mieux vaut prévenir que guérir.
Nous sommes amis, juste amis et c'est très bien ainsi. Je n'aurais sans doute pas dû aborder ce point de notre relation; cela sembla faire germer une idée dans la tête de mon ami.
En amis, il m'a dit, plusieurs jours plus tard, - sans doute ayant eu vent de ma quête fort peu subtile d'un donneur éventuel de vie - que malgré tout, si je ne trouvais pas le père dont j'avais besoin pour l'enfant Lol que je me devais de créer, je pouvais compter sur lui, il était prêt à se sacrifier et me faire cet enfant.
Après un : "heink, toi?" quelque peu vexant et dégoûté, j'en conviens et sa réponse "mais oui, pourquoi pas?" ,
...je lui souris poliment, préférant couper court à la conversation, retenant le "même pas en rêve, mon pauv' vieux" qui me brûlait les lèvres.
"Même pas en rêve, mon pauv' vieux" devint d'ailleurs l'un des titres phares de mon répertoire.
Tu sais, Pierre, j'ai vraiment regretté que ton père m'ait choisie pour ce challenge. D'autant plus que ma mère, sans doute, survoltée par le dernier post scriptum de ton père, chaque soir, me faisait la misère au sujet de ce satané héritage, comme si mes ovaires étaient devenus des sujets de compétition.
Waouw... Il n'y avait pas le feu au lac, quand même!
Cela dit, je suppose que le fait que Cécile, elle, avait mis au monde plus vite que son ombre non pas un mais deux enfants, jouait également dans cette espèce d'hystérie qui avait saisi ma mère.
Je te présente donc, Pierre, ma nièce: Charlotte.
Et mon neveu: Maxence.
Tenir contre moi ces deux petits d'homme me fait à chaque fois regretter mon Arthur, ce fils que j'aurais voulu être mien. Arthur me manque beaucoup, Charles a en effet quitté la maison dès que Zoé lui a raconté que je lui avais demandé de me donner leur fils. Apparemment, Zoé n'a pas bien pris le fait que je veuille m'approprier leur fils et au lieu de m'en parler, Charles est parti. Ils se sont installés dans une petite maison du quartier, pas très loin de chez moi.
Ils ne m'ont ni invitée à l'anniversaire d'Arthur...
...ni à leur mariage, dis donc!
Et oui, Zoé a eu ce qu'elle voulait... Cette femme a réellement ensorcelé mon frère, elle fait de lui ce qu'elle désire. C'est une horreur de constater à quel point l'amour peut vous faire perdre tous sens de la réalité!
La preuve:
Qui pourrait m'expliquer pourquoi Charles et Zoé, qui ont la chance d'avoir un petit garçon aussi exceptionnel qu'Arthur, décident de faire d'autres enfants? C'est ridicule! Arthur aurait été bien mieux avec une maman comme moi!
Mais bon, la vie est ainsi faite, Arthur ne sera jamais à moi.
Plus le temps passait, et plus je perdais patience, consciente que ce qu'il manquait pour me permettre d'honorer le point 2b de mon engagement c'était un homme comme David.
David est de ces hommes qui rendent la femme qu'ils aiment encore plus belle.
C'est un don très rare que lui possède et que j'aurais voulu qu'ait le père de mon futur enfant parce que ces hommes-là font rêver leur femme
...et leur font les plus beaux enfants que Willow Creek n'aient jamais connus. Mais regarde donc ces merveilles que sont devenues Charlotte et Maxence!
Néanmoins, il me fallut me rendre à l'évidence. Je ne rencontrais que des ringards avec à la bouche des "hein, ma poule!" ou des regards lubriques...
...voire des ringards qui se ramenaient chez moi, la fleur aux dents et en slip, tu imagines? C'était quoi le plan? Aller plus vite pour me coucher dans mon propre lit? "Range l'attirail, pèpère, tu n'as pas ce qu'il faut pour me faire rêver!"
Oui, j'ai écrit et tu as bien lu: mon futur enfant. Je suis enceinte à l'heure où je t'écris. Ton père prévoyait un héritier très bientôt, moi, c'est fait. Et il n'y a aucun doute là-dessus.
J'ai honoré ma part du marché et j'ose espérer que mes parents me laisseront à présent être celle que je suis et mener ma vie, sans pression.
A bientôt,
Justine
P.S : Message codé (?) de ma mère à ton père: Lola n'a pu prononcer qu'un seul mot ou plutôt des onomatopées juste , je cite : "Ah! Babam! rrrruuuh ffffrrrr! snif! gggrrrr!" Ensuite, elle s'est écroulée.
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Par Eulaline le 14 Janvier 2015 à 16:40
Pierre,
Je lis avec attention ton courrier et t'en remercie; même si j'avoue que bien des passages m'échappent complètement. Je ne dois pas être en phase avec ton système de pensée.
Je suis très surprise notamment par la première partie me concernant. Si nous vivons dans des villes différentes, je suppose pourtant que les interactions sociales entre personnes sont identiques. A partir du moment où tu demandes à quelqu'un s'il est d'accord d'essayer de faire un bébé et que cette personne accepte... bah, normalement, si tous les neurones sont bien connectés, cette personne connaît le risque les chances que la dame tombe enceinte. Tu as fait un bébé, tu sais comment ça se passe, non?
Un enfant n'arrive pas par hasard, les deux partenaires doivent être d'accord. Il en est de même pour moi et le père de mon enfant, je te remercie de veiller à la réputation des Lol mais je ne suis pas complètement crétine non plus et il m'est désagréable de penser que tu puisses imaginer un seul instant que j'aie choisi le premier venu, juste pour me faire un bébé et qu'il était dans mes plans de m'en débarrasser aussi sec. Si tel avait été le cas, j'aurais choisi John ou mieux mon beau-frère qui fait de superbes enfants - même si j'imagine que j'aurais été très choquée que celui-ci trompe ma sœur avec moi.
Cela dit, j'avoue que ma détermination à tenir mes engagements au sujet de cet héritage a pu prêter à confusion et tu n'es pas le seul à t'être interrogé, effectivement, sur l'identité du père de ma fille, Estelle.
Durant toute ma grossesse, ce papa était le centre de toutes les conversations. Ma mère, à bout d'arguments et certainement toujours furieuse que sa fille-chérie-dernière-née osât lui cacher quelque chose, m'envoya mon père.
Mon frère, Charles, revint comme par miracle dans ma vie pour m'interroger. Il parut carrément effrayé lorsque je lui annonçai que pour l'instant, je ne souhaitais pas parler du père de mon enfant... et non, même pas à maman.
En fait de miracle, je soupçonnais surtout Charlotte d'avoir joué les émissaires auprès de Charles et avoir provoqué notre réconciliation: un Lol en détresse et tous les autres rappliquent, quel que soit le Lol, et peu importe les erreurs passées.
En effet, mes neveu et nièce avaient tant de théories à ce sujet que ma tête en tournait, ils ont une de ces imaginations, ces enfants.
Je me demande si je ne devrais pas freiner un peu les lectures que je leur fais régulièrement. Avoir de l'imagination, c'est bien mais quand même.
Mon beau-frère se sentit obligé de me passer au grill, lui aussi.
Il faut dire que sa fille, Charlotte lui avait un peu mis mal la pression à ce sujet:
...Et John, bien évidemment, se proposa de revendiquer la paternité de cet enfant et était même prêt, lui qui, pourtant, est réticent à l'engagement, à rétablir ma réputation en m'épousant. Il est mignon, John, mais "toujours pas en rêve, mon pauv' vieux!".
A nouveau, Charlotte n'était pas pour rien dans cette réaction.
Toujours, je répondais d'un sourire à leurs questions intrusives et indiscrètes.
Seule ma sœur, Cécile, et je l'en remercie, respecta mon silence à ce sujet.
Contrairement à ce que pense ton papa, Romuald, je respecte les gens. Et si je ne répondais pas aux questions de ma famille et refusais de parler du père de ma fille, c'était par respect pour lui. Je ne savais pas où lui et moi allions. Il avait quitté la ville avant même que je n'aie confirmation de ma grossesse, il avait complètement disparu du paysage, j'avais même perdu son numéro de téléphone et je ne connaissais pas ses intentions à mon égard et celui de notre enfant.
C'est vrai, il m'est arrivé de douter qu'il revienne.
Malgré moi, je pensais à ta mère, Eve, qui avait disparu du jour au lendemain et que tu n'avais jamais connue. Si je me persuadais que je n'avais aucun compte à rendre à ce sujet à ma famille, il en allait autrement pour mon enfant.
Cela dit, les périodes de vague à l'âme ou de crise existentielle ne durent jamais longtemps avec moi. Je ne suis pas du genre à me lamenter d'autant plus que cette période était vraiment favorable à la création. Je n'ai jamais autant et aussi bien composé qu'à ce moment précis. J'étais aux anges, "une guitare à la main, je n'ai peur de rien"!
Et puis, tu le sais, ma fille est née: un bijou, une perle, un trésor qui me pompa toute mon énergie et occupa toutes mes pensées.
Ma mère revint hanter ma vie, toute en douceur. Et fidèle à elle-même me dit les choses simplement: si elle ne comprenait pas mon silence sur l'identité du père d'Estelle, elle l'acceptait. Elle me présenta ses excuses aussi, ce qu'elle n'avait pas à faire, je ne lui en avais jamais voulu parce que je savais que ce n'était là que la conséquence de son inquiétude pour moi.
Je changeai très vite de sujet, profitant d'avoir retrouvé ma maman et lui annonçai que Zoé avait donné naissance à des jumeaux, Adeline et Louis. Je savais que maman était chagrinée de ne pouvoir hanter que notre domaine, la maison de Charles lui étant inaccessible. Moi, j'avais pu leur rendre visite quelques heures à peine avant qu'ils ne deviennent tous deux de magnifiques enfants.
Maman peut être fière de son fils, Charles, non seulement c'est un homme bon mais il a une magnifique famille.
Et il me faut rendre à César ce qui appartient à César et ajouter que mes réticences à l'égard de Zoé n'étaient peut-être pas justifiées. Zoé a aussi ce pouvoir de rendre beau celui qu'elle aime, comme David l'a avec Cécile. Le regard de Charles sur Zoé est sans ambiguïté et il est évident qu'il donnerait sa vie pour elle.
Et vint pour moi aussi le moment de la confrontation, l'instant désiré et redouté: le père d'Estelle venait de réapparaître en ville comme me le confirmait le coup de fil que je reçus sur mon portable.
Je me pris un peu de courage...
"Ca va aller, ma poupouille... Je te ramène ton papounet, promis."
Et je me rendis chez lui. Notre confrontation ne se passa pas exactement comme je l'avais escomptée. Au final, je dois avouer que le voir ainsi attablé à son ordinateur, relevant à peine la tête pour me regarder ne combla pas le vide que son silence et son absence avaient creusé en moi.
La grande finale qu'il me réservait...
"Qu'est-ce qui me dit que cet enfant est le mien?" suffit à me faire fuir.
A voir ce que l'avenir nous réserve...
Bien à toi, mon cousin.
Justine
P.S : Message de ma mère, Lola, à ton père, je cite : "Ainsi, mon frère, il te plait de te dédouaner de toute responsabilité en ce qui concerne le choix de mon héritière, la pression qui pesait sur ses épaules et m'accable de reproches quant à mes compétences de mère... et bien dis donc, tu ne manques pas d'air... C'est bien là, ta nature: accuser la terre entière mais surtout pas toi. Ah! Il est beau l'esprit Lol à Oasis Spring..."
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Petit récapitulatif:
Des nouvelles de Charles:
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Par Eulaline le 24 Janvier 2015 à 14:02
Pierre, bonjour.
Si j'ai bien lu, chez toi, ce n'est pas la joie: ta femme se mêle de la vie de tout le monde et te fait des cachotteries. Ton frère tente d'échapper à son quotidien et à sa compagne trop jalouse et enceinte, en s’enivrant dans les bars. Tu fais pareil mais en te saoulant de jeux vidéo. Ta fille, Charline sombre en dépression. Finalement, ceux qui s'en sortent le mieux sont Grégoire et Annie. Bref, tant que tu as l'impression que tout va bien, faisons comme si...
De mon côté, réellement, tout va bien, ne t'inquiète plus. Estelle est devenue une jeune demoiselle magnifique.
Je suis certaine que la musique qui la berçait chaque soir l'a aidée à si bien grandir.
Comme ton épouse, Cécile a changé, elle aussi, de coupe de cheveux et de style vestimentaire. Ce changement plut beaucoup à mon papa, lui dit-il. Pourtant, il sembla embarrassé tout à coup (?), aurait-il menti à ce sujet? Bah, ce ne serait pas la première fois qu'il trompe quelqu'un.
Autre changement: David, l'époux de Cécile a fêté son anniversaire dans une ambiance joyeuse mais studieuse. Les petits génies de ma sœur, Charlotte et Maxence, sont très assidus à leur formation scolaire. Peu importe les événements, les devoirs n'attendent pas! Ma fille,elle, prend les choses avec plus de légèreté, dirais-je.
Il faut dire qu'Estelle et moi étions surexcitées, nous préparions une sacrée surprise à David pour cet anniversaire.
L'esprit libéré depuis la naissance de ma fille et ma rupture effective d'avec son père, je me consacrais à tout ce que j'aime: la musique,...
Arthur,mon neveu...
...ma fille, Estelle,
...et mon fidèle ami d'enfance, John.
Marcus, le père d'Estelle, n'avait pas tardé à revenir à de meilleurs sentiments et était revenu traîner aux abords de notre terrain. Après avoir franchi les obstacles,..
...il était parvenu à me présenter ses plus plates excuses que j'ai acceptées comme il se doit, ...
...en lui promettant qu'il pourrait apprendre à connaître sa fille autant qu'elle pourrait en avoir envie.
J'avais évidemment posé une condition: ne plus jamais - jamais! - tenter de me séduire ou poser sur moi un regard concupiscent. Lorsque je reçois une gifle, je ne tends pas l'autre joue, moi. Je veux pouvoir continuer à me regarder dans un miroir sans plus rougir de honte. Me voir triste me brise vraiment le cœur.
J'aurais dû préciser à Marcus et le ferai plus tard qu'il n'a plus aucun droit sur moi. Oui, j'aurais dû le préciser parce que selon toute vraisemblance, Marcus a dans l'idée qu'aucun individu de sexe masculin n'a le droit de m'approcher. Son regard est glaçant, même lorsqu'il s'agit de mon frère...
...et s'il s'agit d'un inconnu, il ne se contente pas de son regard de tueur, il y va franco.
Ce jour-là, si je n'avais pas été si bien élevée, je me serais donnée en spectacle.
"Waouw... Calme ta monture, preux chevalier, il m'appartient de décider qui m'approche ou non!"
Après avoir évité mes sentinelles, être parvenu à obtenir mon accord, il restait encore à Marcus à affronter mes parents.
Entre lui et Estelle, au départ, ce fut assez simple; Estelle n'était qu'un bébé braillard. Tout le monde pouvait l'approcher sans risque.
En revanche, quand elle grandit, cela se compliqua.
Retour à l'envoyeur : il ne l'avait pas volée, celle-là! "Bien joué, ma pou-pouille."
Je te disais donc que pour l'anniversaire de David, mon beau-frère, je lui avais préparé un cadeau: emmener ses enfants en week-end! Ainsi ils pourraient enfin goûter à la vie à deux avec ma sœur. Il faut bien avouer que jamais, tous les deux, ils n'ont eu cette opportunité. C'était l'occasion rêvée. J'en profitai également pour proposer aux jeunes de mon frère de nous accompagner. Zoé parut ravie à cette perspective et se chargea elle-même de réserver notre campement;...
...ce fut la bien la seule: les autres semblèrent franchement étonnés.
"Comment, toi, toute seule, avec toute cette marmaille... mais, ma pauvre chérie, tu ne te rends pas compte?"
C'étaient eux qui ne se rendaient pas compte que j'avais toujours rêvé d'être chef scout. Non, je ne plaisante pas.
Marcus tenta une fois la première réticence passée à me convaincre qu'il m'accompagnerait. Non, merci. Les nuits étoilées, le grand air, toute cette marmaille autour de moi...
Il n'était pas question que je tente le diable, même si le diable est assez givré pour passer la serpillière dans le jardin, en caleçon orange, les tatouages à l'air. Il est sexy, le père de ma fille, quand même.
Tsss...Tsss... Chat échaudé ne fait pas que craindre l'eau froide, il s'en tient éloigné et il a bien raison!
Et voilà, comment tous les sept, nous sommes arrivés à Granite Falls.
Le séjour fut merveilleux, comme je l'imaginais: feu de camp, histoires de fantôme, musique, jeux, pêche, discussions et câlins bien sûr.
La marmaille des autres, finalement, me causa peu de soucis; ce fut Estelle, ma fille, qui fut la plus compliquée à gérer. Je ne sais pas de qui tient cette enfant, mais il faut toujours qu'elle n'en fasse qu'à sa tête. Elle courait par les chemins à toute heure, seule.
Pourtant, j'avais formellement exigé que toute randonnée se fasse minimum à deux.
Ainsi fit-elle la connaissance d'une pauvrette en haillons...
...qu'elle se sentit obligée d'inviter à notre campement...
...sous prétexte que cette brave dame lui avait appris à lire dans les nuages.
Nous ne sommes pas des barbares, il y a toujours une place à table, une assiette, un peu de chaleur, chez les Lol, pour les vagabonds en errance et les va-nu-pieds. Je n'hésitai donc pas à accueillir cette femme comme il se doit, espérant secrètement que mon savoir-vivre ne renforcerait pas le besoin de ma fille Estelle à recueillir tous les chiens sans collier qu'elle croiserait.
Cette pauvrette, vraiment, par moments tenait des propos totalement incohérents.
C'était un peu angoissant quand même.
Je ne fus pas mécontente lorsqu'elle décida de nous quitter, j'avais craint un instant qu'elle ne s'incruste plus que cela.
Le retour à Willow Creek me précipita dans une ronde d'anniversaires,...
...annonciatrice d'un changement encore plus grand, pour sûr: Cécile ne tardera pas à quitter le nid, elle aussi, avec ses deux enfants, devenus à présent adolescents. Je suis si heureuse pour eux tous. Je suis certaine que tout se passera bien pour eux.
Quant à moi, je ne serai jamais seule. Mes parents veillent sur moi et Estelle. Qu'espérer de mieux?
A très bientôt, Pierre.
Justine
P.S : Message de ma mère, Lola, à ton père, je cite : "Alors, mon cher Romuald? Elle est topissime, ma Justine, n'est-ce pas? Je ne voudrais pas en ajouter à la honte qui doit être la tienne d'avoir osé douter d'elle mais franchement, elle assure, ma fille!
Et ma petite-fille... Ah! Elle est exceptionnelle, elle aussi, et très jolie en plus.
Voilà, sans conteste, je peux me vanter d'avoir repris la main dans ce défi.
Bises, mon frère, et courage...
Lola"
Petit récapitulatif :
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Par Eulaline le 6 Février 2015 à 16:48
Cher Pierre, mon cousin,
Quel bonheur, tu l'imagines, de lire de tes nouvelles à travers le récit de ta fille, Charline. C'est avec plaisir que je joins à la présente une carte postale de Willow Creek à son intention.
Que ne ferais-je pour le sourire d'un enfant?
Puisque je parle enfant, je pense à Estelle. Estelle a toujours des idées saugrenues en tête. Voilà l'une d'elles.
"Maman, s'il te plait, ce serait trop gai: Imagine, papa, toi et moi en camping, comme une vraie famille."
"Mais nous sommes une famille, Estelle, même si papa et moi ne sommes pas..."
"Prouve-le que nous sommes une vraie famille! Dis oui...Et partons ce week-end."
Alors, bien sûr, j'ai dit oui. Il me plaisait de toute façon d'échapper à cette immense maison laissée vide par le départ de Cécile, son mari et ses enfants.
Cette énorme bâtisse pour ma fille et moi, c'était quand même un peu angoissant et je ne te parle pas des factures à honorer seule; mes compositions ont encore un peu de mal à trouver leur public et il m'arrive de penser que ma mère avait raison: musicien, c'est un boulot de crève-misère.
Je me suis donc nouée mes problèmes, mes soucis et mes angoisses en cravate et les ai envoyés valser derrière mon épaule: direction Granite Falls avec le père et la fille, espérant que le saint esprit m'accompagne et que je ne commette aucun crime.
La rancœur est un poison que je redoutais.
En certains points, ce séjour ressembla au précédent: jeu,...
...pêche,...
...musique,...
...câlins;
La différence résidant dans le regard plein d'espoir que ma fille, Estelle, posait sur son père et moi, ne laissant aucun doute quant au plan qu'elle avait imaginé pour nous rapprocher.
Je retrouvais c'est sûr le goût de Marcus, de cette complicité qui avait été la notre, avant la naissance d'Estelle ...
...et je me faisais violence très souvent pour ne pas réclamer la chaleur de ses étreintes, comme une gosse en mal de tendresse.
Tsss... Tais-toi, mon cœur, me disais-je encore à ce moment-là, souviens-toi comme je te pleurais dessus...
Et Marcus de nous le rappeler, d'ailleurs, charmant de ci de là, de jolies damoiselles,...
... Estelle se chargeant à sa façon de dégoûter lesdites charmantes demoiselles.
Lorsque je sentais que ma chère fille était sur le point de dépasser les bornes,...
....j'intervenais gentiment.
"Tu dois laisser papa parler aux dames qui lui plaisent, Estelle."
Estelle de souffler, très en colère contre moi:
"Elles ne lui plaisent pas, enfin MA-MAN! Il veut juste te rendre jalouse!"
"Je ne suis pas jalouse, ma chérie."
Et à l'étouffer, je la serrais contre moi, jusqu'à l'entendre rire.
Ma fille n'a pas que l'air d'un ange, c'est un ange mais un ange buté qui ne renonce jamais.
Il me faut encore noter une autre différence, en comparaison à notre précédent séjour à Granite Falls. Cette fois, Estelle ne nous ramena pas une pauvrette en haillons mais un ours.
"Ce n'est pas un vrai ours, maman..."
Oui et bien, il avait quand même de grandes dents pour un faux ours.
Et ce fut ainsi que je me retrouvai à griller des guimauves et à jouer de la guitare pour un ours. Rien de plus normal, n'est-ce pas?
Le retour à la maison rima avec le retour de mes angoisses - la maison vide, les factures qui s'accumulaient, ma musique qui ne me plaisait plus -...
...et le regain d'animosité entre Marcus et moi.
Je ne sais pas ce qu'il me reprochait...
...et je ne sais pas pourquoi je ne parvenais pas à me sortir de mon malaise et à l'affronter en vraie Lol que je suis.
Pourtant, je me faisais violence, j'essayais vraiment de me sortir du trou. Je voulais être amicale avec Marcus, je lui avais même préparé un gâteau pour son anniversaire, afin qu'il puisse le fêter avec sa fille.
Estelle aime beaucoup son papa.
Pourquoi, moi, je ne parvenais pas au moins à maintenir une certaine harmonie? Et sans cesse, je fuyais. Je devenais vraiment la championne de la fuite, j'aurais dû être plombier plutôt que musicienne.
Je savais pourtant à quel point cette situation peinait ma fille.
Et puis, il y eut le soir. Le soir de trop? J'étais au bout du rouleau, tout me pesait tellement. J'étais une mauvaise mère, une mauvaise musicienne, une horrible fille, une sœur atroce et une amante ratée. C'était cela, la réalité.
Je le vis, assis dans l'obscurité, sur notre terrasse. Et là, je craquai totalement, oubliant toutes mes belles résolutions, toutes mes questions, morte de peur et tellement, tellement fatiguée... J'avais tant besoin de lui. Lui seul pouvait m'offrir ce dont, si désespérément, j'avais besoin. Je ne fuis pas, cette fois. Je pris place à ses côtés.
Et je le suppliai, c'était ça ou mourir:
"Marcus... je t'en prie... ne dis rien... prends-moi dans tes bras..."
Et je fis miens les mots d'un autre* et il ne me repoussa pas.
"Prends moi dans tes bras
J'ai besoin ce soir
Au moins une fois
D'être dans le noir
De ne plus penser
De fermer les yeux...Prends moi dans tes bras
Je veux me cacher
Prends moi dans tes bras
Je suis fatiguéeJe n'ai plus envie
De vivre ma vie
Prends-moi dans tes brasLe temps d'une nuit
Je te laisse mes désirs
Mes rêves et mes souvenirs
Ce soir fais- moi oublier
Toutes les choses que j'ai ratéesCe n'est pas facile
De dire tous ces mots-là
Je me sens fragile
Pour la première foisPrends-moi dans tes bras
Viens me réchaufferJe tremble et j'ai froid
J'ai le corps brisé
Prends-moi dans tes brasJe voudrais crier
Que je n'ai que toiEssaie de m'aider
Prends moi dans tes bras
Parle moi un peuDis n'importe quoi
Et ça ira mieuxJe me suis perdue
Depuis trop longtemps
Et je ne crois plus
A ce qui m'attendJe te laisse mes royaumes
Mes angoisses et mes fantômesTu vois, je suis comme un môme
Qui n'a plus envie de jouerJ'en ai marre de tout
Je ne comprends plus rien
Je suis à genoux
dans le creux de tes mainsPrends- moi dans tes bras
J'ai besoin ce soir
Au moins une fois
D'être dans le noir
De ne plus penser
De fermer les yeuxDe laisser aller
Mon cœur malheureuxPrends-moi dans tes bras
Je veux me cacher
Prends-moi dans tes brasJe suis fatiguée
Je n'ai plus envie
De vivre ma vie
Prends-moi dans tes brasLe temps d'une nuit"
Oui, le temps d'une nuit. Et demain... Bah...peu importe.
Ce soir, cette nuit, j'ai tout oublié, entre ses bras, serrée contre lui, couverte de baisers par lui, le seul homme que j'aie jamais aimé,...
...le seul que j'aime depuis si longtemps, le seul que j'aimerai toujours. Je le lui avais promis, je ne lui avais pas menti.
C'était peut-être juste cela que j'aurais dû lui dire : "Je t'aime".
"Tsss... Tais-toi, mon cœur."
Je t'embrasse, mon cousin.
Justine
PS:
"Romuald,
Si ce petit clown ne revient pas dare-dare, je m'en irai le lui faire payer!
Foi de Lola
...,
Lola"
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Pas de changement:
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